Le message de David Cameron est clair et François Hollande semble avoir été entendu. "Nous devons étendre notre campagne militaire à la Syrie" afin de priver le groupe djihadiste d'un "sanctuaire" dans ce pays, estime le Premier ministre britannique, qui défend ainsi des frappes contre le groupe État islamique en Syrie dans une réponse à un rapport parlementaire. Le Royaume-Uni ne peut pas "sous-traiter sa sécurité à d'autres pays", estime-t-il. David Cameron, qui a la "ferme conviction" que le Royaume-Uni devrait intervenir militairement en Syrie, présentait ainsi sa stratégie au Parlement, avant un vote la semaine prochaine. Mercredi, le Premier ministre canadien Justin Trudeau a affirmé que son pays, qui a abandonné les frappes aériennes, était en train de réétudier sa participation militaire à la coalition contre l'EI, qu'il a souhaitée "constructive". Le Parlement français a massivement voté mercredi soir pour autoriser la poursuite des frappes aériennes en Syrie. "Il n'y a pas d'alternative : nous devons anéantir Daech", a lancé le Premier ministre Manuel Valls.
Cette déclaration de David Cameron intervient alors que François Hollande poursuit ce jeudi son marathon diplomatique en vue d'une coalition élargie anti-État islamique (EI) en se rendant à Moscou pour rencontrer Vladimir Poutine, une démarche mise à mal par les tensions russo-turques, même si l'heure est à la désescalade. Ce matin, il a déjà rencontré le président du Conseil italien Matteo Renzi. Outre l'Italien, le chef de l'État français a déjà rencontré depuis le début de la semaine David Cameron, Barack Obama et Angela Merkel. La coordination de la lutte contre l'organisation djihadiste EI, qui a revendiqué mercredi l'attentat-suicide de mardi en plein coeur de Tunis, est compliquée, surtout après la destruction, mardi, d'un chasseur russe par la Turquie, pays de l'Otan et membre de la coalition anti-EI, au motif que l'avion aurait violé son espace aérien. La Russie a déjà annoncé des mesures de représailles économiques contre la Turquie.
Malgré cet incident, le plus grave entre Moscou et Ankara depuis le début de l'intervention militaire russe en Syrie il y a deux mois, les dirigeants des deux pays ont dit vouloir éviter une escalade militaire dans la région. Le chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov a souligné mercredi que Moscou "ne fera(it) pas la guerre à la Turquie". Le président turc Recep Tayyip Erdogan a également assuré que son pays voulait éviter toute "escalade" avec Moscou. Cet incident a néanmoins mis à mal la stratégie de Vladimir Poutine partisan d'une coalition internationale appuyant les armées syrienne et irakienne. Et partant celle de François Hollande favorable à une coalition "élargie" contre l'EI depuis les attentats de Paris du 13 novembre, qui ont fait 130 morts.
Mercredi, le président français a néanmoins obtenu d'Angela Merkel la promesse de s'engager "vite" et "au côté de la France" dans la lutte contre le groupe djihadiste. "Je souhaite que l'Allemagne puisse s'engager encore davantage dans la lutte contre Daech (acronyme arabe de l'État islamique) en Syrie et en Irak", a souligné François Hollande lors d'une déclaration à l'Élysée au côté d'Angela Merkel. "Nous serons au côté de la France", lui a répondu cette dernière en promettant d'agir "vite". L'Allemagne, qui ne fait pas partie de la coalition alliée engagée en Irak et Syrie, a annoncé vouloir envoyer jusqu'à 650 soldats supplémentaires au Mali afin de soulager l'effort de guerre de la France mené parallèlement au Sahel et au Moyen-Orient. Les 27 partenaires de la France au sein de l'Union européenne vont tous apporter un soutien militaire direct ou indirect aux opérations françaises extérieures, a annoncé de son côté le ministre français de la Défense, Jean-Yves Le Drian, sans plus de précisions.
Du côté des États-Unis, en dépit de l'unité affichée avec la France après les attentats de Paris, François Hollande semble avoir obtenu mardi peu d'engagements auprès de Barack Obama, au-delà d'une promesse d'intensifier les frappes américaines et les échanges de renseignement bilatéraux. Barack Obama a émis de fortes réserves sur les possibilités de coopérer avec la Russie sur la Syrie tant qu'il n'y aura pas de "changement stratégique" de Vladimir Poutine, rendant très hypothétique la possibilité de former un état-major de commandement unique incluant Moscou. Washington et Paris reprochent à la Russie de frapper davantage l'opposition modérée syrienne que les positions de l'EI, et de soutenir le président Bachar el-Assad, dont les Occidentaux réclament le départ. Le conflit syrien a fait plus de 250 000 morts depuis 2011 et contraint des millions de Syriens à l'exil.