La France annoncé avoir mené dimanche d'importants bombardements à Raqqa, fief de Daech. L'armée française a largué 20 bombes sur la ville, détruisant un poste de commandement et un camp d'entraînement, selon le ministère de la Défense.
Ce bombardement intervient au moment où, à Paris, on évoquait un véritable «tournant» dans la coopération militaire avec les États-Unis contre Daech. Jean-Yves Le Drian s'est entretenu au téléphone à deux reprises dimanche avec son homologue Ashton Carter, et les deux hommes sont convenus conjointement de «mesures concrètes» contre l'État islamique (EI) en Irak et en Syrie.
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Parmi ces mesures, une coopération plus étroite et plus confiante dans le partage du renseignement. Ceci dans la perspective de constitution de «dossiers d'objectifs», l'identification de cibles qui seront «traitées» par des frappes aériennes. Ces dernières vont connaître une «intensification» en Syrie, confirme-t-on dans l'entourage du ministre de la Défense. Des camps d'entraînement djihadistes, des infrastructures pétrolières - sources d'importants revenus pour Daech - et, espère-t-on, des centres de commandements de l'EI vont être visés. «Il ne s'agira pas forcément de frappes spectaculaires mais d'une montée en puissance progressive, grâce à la constitution de dossiers d'objectifs et à la présence dans la zone du porte-avions Charles-de-Gaulle», ajoute-t-on au cabinet de Jean-Yves Le Drian.
Cette intensification a en effet été préparée par l'envoi, en Méditerranée et dans le Golfe, du navire amiral de la Marine nationale. Le Charles-de-Gaulle appareillera cette semaine de Toulon, pour une mission dont la durée est fixée à quatre mois. Comme l'a indiqué Jean-Yves Le Drian, dimanche dans LeJournal du dimanche, la France disposera de 36 avions de chasse pour combattre Daech: aux 12 Rafale et Mirage positionnés sur les bases aux Émirats arabes unis et en Jordanie s'ajouteront les 24 avions emportés par le porte-avions. Au total, il s'agit donc d'un triplement des capacités. «Ces renforts capacitaires nous permettront de maintenir le niveau de frappes tout en poursuivant les missions de renseignement, ce qui aurait été plus difficile sans le Charles», explique une source à la Défense.
Le 7 septembre dernier, François Hollande annonçait des vols de reconnaissance en Syrie. La première frappe a eu lieu le 27 septembre. «Les Américains ont vu notre détermination», affirme-t-on à la Défense. Le «malentendu» avec Washington qui résultait de notre non-intervention en Syrie a été surmonté et la confiance a été restaurée, ajoute-t-on. Côté français, les griefs concernant le peu d'entrain des Américains à partager leur renseignement étaient nombreux. «Aveugles» en Syrie depuis le lancement de l'opération «Chammal», en septembre 2014, qui ne concernait que l'Irak, les Français ont été en mesure d'accumuler depuis trois mois les informations sur les implantations de Daech. Et depuis les attaques de vendredi, il y a eu un «déclic» chez les Américains, se félicite-t-on à l'Hôtel de Brienne. «Les livres s'ouvrent», dit-on encore.
La réponse militaire aux dramatiques événements de vendredi concernera également le territoire national. Le renforcement des effectifs de «Sentinelle» de 7 000 à 10 000 hommes, dont 1 500 pour l'Île-de-France, sera achevé mardi soir. À cette date, les militaires seront «totalement disponibles pour faciliter la tâche des forces de sécurité intérieure», relève-t-on. Quantitativement, l'effort est jugé considérable, compte tenu du fort niveau d'engagement des armées françaises, en Afrique notamment. Par ailleurs, les hôpitaux d'instruction des armées, Bégin et Percy, en région parisienne, ont accueilli des blessés, dont quinze étaient toujours dimanche en état «d'urgence absolue». Un site centralisé pour la prise en charge psychologique des familles de victimes a été mis en place à l'École militaire.